Ma tribune pour le cercle des économistes. Libérer les agriculteurs
« On sait ce qu’il va arriver lorsque cela arrive. » Cette phrase qui résume parfaitement la situation n’est pas de moi, mais d’un agriculteur. Et je l’entends tellement souvent.
Oui, la profession fait face à un malaise de plus en plus grandissant, avec notamment un risque du suicide plus élevé chez nos agriculteurs que le reste de la population. Selon la sécurité sociale agricole (la Mutualité sociale agricole, MSA), ses assurés de 15 à 64 ans ont un risque de mortalité par suicide supérieur de 43,2% par rapport aux assurés des autres régimes dans cette même tranche d’âge. Pour les personnes de 65 ans et plus, le risque de suicide est deux fois plus élevé. Concrètement, plus d’un agriculteur par jour se suicide en France.
C’est l’une des raisons qui mont poussée à évaluer, il y a plusieurs mois, la manière dont sont opérés les contrôles dans les exploitations agricoles mais également à livrer des pistes pour apaiser les relations entre les agriculteurs et l’administration française.
UN « DROIT À L’ERREUR »
Des années que la situation agricole se détériore. Si, à l’évidence, les difficultés ne datent pas d’hier, celles ci méritent une réelle prise en compte globale de nos agriculteurs en tant qu’entrepreneurs de manière à assurer et surtout garantir notre souveraineté semencière et alimentaire.
Pour cela, mon implication est totale pour faire admettre un « droit à l’erreur • pour nos agriculteurs. Car, même de bonne foi, ils sont stigmatisés comme des « délinquants de Y’environnement » alors qu’ils en sont les premiers protecteurs. Dans un contexte de défiance à l’égard des pratiques agricoles, accréditée souvent par la voie des tenants de la décroissance, il devient plus qu’urgent d’inverser la charge de la preuve face à l’administration. Car s’il est théorique ment reconnu à chaque citoyen, les agriculteurs en sont exclus en raison de restrictions liées au droit de l’Union européenne et aux normes environnementales.
Alors, c’est l’anxiété qui accompagne désormais la vie de ceux qui nous nourrissent avec grande générosité et courage. Les regards sont souvent sans concession pour les pratiques agricoles, mais surtout déconnectés du réel. Car, faut-il le dire - et aussi incroyable que cela puisse paraitre - des réglementations qui ne poursuivent pas nécessairement les mêmes objectifs, ni ne fixent les mêmes impératifs, finissent par être contradictoires. Et, donc, sur des fondements juridiques distincts, elles peuvent conduire à apprécier de manière radicalement différente la conformité d’une même situation ou d’un même acte (on peut citer la gestion des haies ou encore des cours d’eau).
Si nous voulons accompagner et sauver notre agriculture française et ses agriculteurs, il faut leur donner de l’air, alléger la pression et arrêter les suspicions que l’on porte sans cesse sur eux, c’est cela la clé.
Si nous ne faisons pas cela, il faudra admettre que nous les abandonnons aux méandres d’un système technocrate qui les engouffrera. Pour ma part, mon engagement sera à leurs côtés.