IVG : l’équilibre de la loi Veil au cœur des débats

IVG : l'équilibre de la loi Veil au cœur des débats

IVG : l’équilibre de la loi Veil au cœur des débats

L’Assemblée a voté l’allongement du délai légal de l’avortement mais pas la suppression de la clause de conscience spécifique.

L’IVG, un acte médical comme un autre ? La question était au cœur des débats tumultueux sur la proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement, portée par Albane Gaillot (non inscrite, ex-LREM). Mardi soir, le texte a été adopté en seconde lecture par 79 voix contre 36 et 8 abstentions. Mais si les députés ont voté en faveur de l’extension du délai légal de l’IVG de 12 à 14 semaines de grossesse, ils ont cependant refusé de supprimer la clause de conscience spécifique permettant aux médecins de refuser de pratiquer un avortement.

Un amendement de la députée LR Anne-Laure Blin a finalement été adopté pour maintenir cette objection de conscience accordée aux personnels de santé. Pour les opposants au texte, ce changement aurait mis définitivement fin à l’équilibre de la loi Veil. D’autant que cette dernière a déjà été retouchée, à plusieurs reprises ces dernières années, avec la suppression de la notion de détresse pour justifier le recours à l’avortement (2014), la suppression du délai de réflexion (2016) ou encore la création d’un délit d’entrave numérique à l’IVG (2018).

La clause de conscience spécifique à l’IVG prend en compte « le fait que l’avortement n’était pas un acte médical comme un autre, puisqu’il consiste à faire cesser une vie humaine », plaide Anne-Laure Blin. Sur les réseaux sociaux, elle s’est réjouie de l’adoption de son amendement car « l’IVG n’est pas un acte médical “banal” ». Pour le député LR Thibault Bazin, ce changement aurait conduit à « un bouleversement de l’équilibre de la loi défendue par Simone Veil ». La clause de conscience générale reconnue aux médecins, inscrite dans le code de la santé publique, « n’est pas de nature législative mais réglementaire » et « beaucoup moins protectrice », a-t-il relevé. Ce vote fait écho aux prises de position d’Emmanuel Macron contre le texte. « Je mesure le traumatisme que c’est d’avorter », a-t-il notamment déclaré dans le magazine Elle. En octobre 2020, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) s’était également prononcé pour le maintien de cette clause car la pratique d’une IVG ne peut « être considérée comme un acte médical ordinaire ».

« Un droit à part »

À l’inverse, pour Albane Gaillot, il s’agit d’un « doublon avec la clause de conscience générale qui stigmatise l’IVG », « en fait un droit à part » et un « frein » à la pratique des avortements. Cette clause « n’a pour seul impact que de stigmatiser » les femmes désireuses d’avorter, s’est émue Annie Chapelier (Agir), agacée par ce vote « d’une autre époque ». Du côté des médecins, le Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (Syngof), le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), l’Ordre des médecins et l’Académie de médecine se sont tous prononcés contre la suppression de cette clause.

C’est la « dernière balise forte qui reste » pour préserver l’équilibre de la loi Veil, estime le Dr Bertrand de Rochambeau, président du Syngof, par ailleurs inquiet de l’allongement du délai à 14 semaines. Après ce vote, le parcours législatif du texte apparaît incertain. Au Sénat, ni les élus de la majorité ni les élus socialistes favorables à la loi ne semblent décidés à l’inscrire dans une niche parlementaire avant la fin du mandat. « On peut parler impasse », grince-t-on dans l’entourage l’ancienne ministre des Droits des femmes, Laurence Rossignol.


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