Fin de vie : la droite presque unie pour s’opposer au projet de loi

Fin de vie : la droite presque unie pour s'opposer au projet de loi

Fin de vie : la droite presque unie pour s’opposer au projet de loi

Les députés Les Républicains sont hostiles au texte débattu à partir de lundi à l’Assemblée nationale. A l’opposition initiale des plus conservateurs sont venus s’ajouter les doutes de certains sur le projet modifié en commission.

Le projet de loi sur la fin de vie arrive lundi 27 mai à l’Assemblée nationale. Députée Les Républicains (LR) de Corrèze, Frédérique Meunier s’est déjà préparée à l’idée d’être « isolée dans [sa] famille politique » lors des discussions dans l’Hémicycle. A rebours de la majorité de son groupe, l’élue dit avoir changé d’avis sur le sujet pour avoir participé pendant deux ans au groupe de travail parlementaire. « Auparavant, j’étais très mal à l’aise de parler de droit à mourir, mais à l’écoute des différents témoignages, j’ai compris qu’il fallait entendre cette demande », dit-elle.
Des sept députés LR présents en commission spéciale, Mme Meunier a été la seule à soutenir les principaux changements voulus par la gauche et une partie de la majorité avant le vote du texte à main levée dans la nuit du 17 au 18 mai. « Pour en avoir discuté avec certains indécis dans mon groupe, ce qui s’est déroulé en commission va les faire basculer vers un vote contre », annonce de son côté la députée du Doubs Annie Genevard.

Très hostile au texte initial, la secrétaire générale de LR avait fait part en commission de sa « sidération » sur le changement des conditions requises pour avoir accès à cette aide à mourir. « Un verrou essentiel saute quand le pronostic vital engagé à court ou moyen terme est remplacé par la notion d’affection en phase avancée ou terminale », avance-t-elle.

Avec ce nouveau critère, certains dénoncent une acceptation beaucoup trop large. « On est passé à autre chose, déplore Philippe Juvin, député des Hauts-de-Seine et médecin. Le diabète, par exemple. C’est incurable, on ne sait pas le guérir et vous pouvez être en phase avancée. Cette définition choisie pour se débarrasser du terme moyen terme qui posait problème est pire car elle ouvre le champ de la fin de vie à des gens qui ne vont pas mourir de leur maladie. »

Le texte « s’est déséquilibré »

A droite, les plus farouches détracteurs dénoncent même « une rupture anthropologique et éthique », à l’image du député du Bas-Rhin Patrick Hetzel. Un pas en avant vers un droit à l’euthanasie qui ne dirait pas son nom. La sémantique n’est pas un détail, selon Anne-Laure Blin. « Avec ce texte, clairement on change de paradigme, regrette l’élue du Maine-et-Loire. Mais sans le dire car jamais ni les mots de suicide assisté ou d’euthanasie ne sont employés. A l’évidence, certains veulent mettre en place ce qui se fait en Suisse ou en Belgique. Il faut assumer ! »

Pour la ligne la plus conservatrice du groupe LR, l’épisode de la commission spéciale montre bien que « les militants de la cause voudront toujours aller plus loin », avance Mme Blin. « D’ailleurs, lorsque l’on regarde ce qui se fait dans d’autres pays, on voit bien qu’il y a risque de dérives. En réalité, il ne peut exister de “garde-fous”, comme l’a d’ailleurs démontré la commission spéciale en à peine cinq jours », poursuit-elle.

D’autres ont vu leur bienveillance initiale vaciller, à l’image de Yannick Neuder. Cardiologue toujours en exercice, le députe de l’Isère trouvait « le texte plutôt équilibré » avant de tirer la sonnette d’alarme lors de la commission spéciale dont il était membre. « Au fil des discussions, il s’est déséquilibré sur de nombreux points : critères, collégialité, personnes sous tutelle ou curatelle… Je suis très interrogatif et j’attends les débats en hémicycle pour me prononcer. Je ne veux pas voter pour un texte qui ouvrirait la boîte de Pandore. »

« Une majorité de Français veulent cette loi »

Chez les opposants les plus résolus au texte, l’exemple de M. Neuder est présenté comme représentatif du basculement possible d’une partie des députés LR. En interne, certains avancent la possibilité de voir au moins les deux tiers du groupe voter contre. Aurélien Pradié fait partie des rares voix dissonantes. « Pour l’heure, mon cheminement me porte à voter le texte », déclare le député du Lot dans un entretien à Libération lundi.
Le président des Républicains, Eric Ciotti, avait décidé dès le départ de laisser les uns et les autres voter en fonction leurs convictions sur un sujet « qui touche à l’intime et aux libertés personnelles ». Il s’agit aussi d’éviter d’interférer avec les élections européennes. « On connaît les réticences sur la fin de vie de notre tête de liste, François-Xavier Bellamy, et nos chefs veulent éviter de le mettre en difficulté juste avant l’élection, ce que je peux comprendre », admet Frédérique Meunier.

« Aide à mourir » : quels sont les points les plus controversés du projet de loi ? Comprendre
en trois minutes

L’Assemblée nationale commence à débattre, à partir du 27 mai, du « projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie ». Vingt séances publiques ont été programmées pour examiner ce texte qui suscite d’autant plus de désaccords que l’enjeu est lourd : seize de ses vingt et un articles ont pour but d’autoriser une « aide à mourir », ce qui serait une première en France.
Plusieurs points ont déjà été modifiés lors de l’examen du texte en commission spéciale, parfois contre l’avis du gouvernement. C’est le cas de la suppression du critère de « pronostic vital engagé à court ou moyen terme », remplacé par celui de « phase avancée ou terminale » d’une maladie. Dans cette vidéo, nous détaillons ces principaux points de tensions, tout en donnant les principaux arguments de chacun.


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