Le budget 2022 manque de lisibilité !

Le budget 2022 manque de lisibilité !

Le budget 2022 manque de lisibilité !

Rapporteur pour avis sur le volet entreprises du PLF 2022, je suis intervenue ce lundi matin à la tribune pour dire que le budget est en trompe l’œil mais aussi qu’au-delà des crédits, il faut surtout une lisibilité et une simplicité des dispositifs pour les entreprises.


Mon intervention en intégralité :

Devant la commission des affaires économiques, j’ai exprimé des doutes sur la portée des engagements du programme 134, au regard des enjeux de la sortie de la crise sanitaire. Je n’ai malheureusement pas été suivie. Je ne peux que mettre en garde la représentation nationale contre une évolution des crédits et des emplois qui présente de nombreux effets d’optique. Malheureusement, il ne s’agit pas là d’un constat nouveau : en conclusion de l’avis budgétaire sur le projet de loi de finances initiale pour 2021, notre collègue Rémi Delatte avait déjà mis en lumière une discordance entre les moyens et les objectifs affichés. À bien des égards, ces constats demeurent.

Oui, le projet de loi de finances pour 2022 propose une hausse globale des crédits ; en l’occurrence, les crédits de paiement enregistrent une hausse de 31,88 %. Mais, en réalité, cette dynamique apparente procède d’un facteur déterminant, à savoir l’évolution des compensations accordées à La Poste au titre du service universel postal ainsi que des missions d’aménagement du territoire.
Ainsi, le service universel donne lieu à l’inscription d’une dotation de 520 millions d’euros. En outre, le Gouvernement propose de renforcer la subvention accordée par l’État en 2022 afin de remédier à l’insuffisance des ressources fiscales allouées au fonds postal national de péréquation territoriale. Sur le principe, on se félicitera évidemment de ce que l’État renouvelle son soutien à un groupe public qui joue un rôle encore essentiel dans la vie économique et sociale du pays. Mais, comme de nombreux collègues, j’en viens à ce constat : en l’absence de réorganisation, les ressources dégagées ne nous prémunissent pas contre la dégradation du service postal qui affecte un nombre croissant de zones du territoire national, en particulier dans les zones rurales.

De plus, le programme 134 ne comporte ni inflexion ni nouveaux moyens en faveur du développement des entreprises et de la régulation. C’est le cas pour les dépenses fiscales, dont le montant prévisionnel atteint un peu plus de 20 milliards d’euros, mais dont le chiffrage – au demeurant non renseigné pour certains des soixante-cinq dispositifs supportés par le programme – apparaît tributaire d’imputations comptables qui conservent une part d’arbitraire. Sur le plan des actions budgétaires, l’évolution des financements programmés présente un caractère pour le moins contrasté. J’en veux pour preuve la baisse très sensible des crédits demandés au titre de la compensation des sites très électro-intensifs à laquelle il est prévu d’allouer, dans le cadre de l’action 23, la somme de 344,21 millions d’euros. Cette budgétisation tiendrait compte d’une évolution des paramètres de calcul de compensation et s’inscrirait dans la perspective de l’entrée en vigueur en 2022 de nouvelles lignes directrices européennes. La programmation budgétaire n’en aboutit pas moins à une réduction de l’enveloppe consacrée au dispositif dont il conviendra de mesurer précisément les effets.

J’appelle également votre attention sur la poursuite de la réduction du plafond d’emplois. Le projet de loi de finances propose d’autoriser un effectif maximal de 4 448 équivalents temps plein. En pratique, ces chiffres marquent une stabilisation toute relative des emplois accordés à la DGE, la direction générale des entreprises, alors que les précédents exercices se caractérisaient par des réductions d’effectifs assez sensibles.
Toutefois, cette mesure ne saurait constituer une réponse aux interrogations persistantes qui entourent les moyens affectés aux services économiques de l’État en région. La réforme du pôle 3E (entreprises, emploi et économie) des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) a donné lieu à une réorganisation à l’échelle régionale et à un resserrement des missions qui ont justifié un recul très sensible des effectifs, or la crise sanitaire a mis en relief l’importance d’une certaine proximité dans l’exercice des compétences relatives au développement économique et au soutien des entreprises.

Pour ce qui concerne les autorités administratives indépendantes et les services de la DGCCRF, la programmation pour 2022 comporte quelques emplois supplémentaires, notamment au bénéfice de l’ARCEP, l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse. Mais, dans l’ensemble, rien n’assure qu’elles répondent aux besoins inhérents à l’exercice de missions de régulation de plus en plus exigeantes.
On m’objectera sans doute que le plan de relance et le plan France 2030 pourvoiront à tout. Mais nous devons la vérité à ceux qui nous écoutent : le plan France relance constitue un instrument de financement ponctuel, or les engagements pris par le Gouvernement demandent à être concrétisés au-delà de la présente législature. En outre, je tire de mes travaux thématiques la conclusion suivante : l’efficacité des dispositifs d’accompagnement et de soutien apporté aux entreprises par les collectivités ne dépend pas seulement du niveau des ressources mobilisées, elle exige également que la lisibilité et l’accessibilité de ces dispositifs soient suffisantes. Cette nécessité s’impose également sur le plan budgétaire.

Mes chers collègues, au regard de son périmètre et de l’orientation de ses financements, je doute, comme nombre d’entre vous, que le programme 134 apporte une contribution réelle aux objectifs que lui assigne pourtant la maquette budgétaire. Aussi, à titre personnel, j’émets un avis défavorable au vote des crédits du programme 134 et de la mission Économie .


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